“Et toi, tu fuis quoi aujourd’hui ?”
Hier, sur Instagram, je suis tombée sur le profil d’un jeune Marocain étudiant en France, grandes études de commerce, tempérament jovial et vivant, et qui a décidé, du haut de ses 23 ans, d’être l’avocat des jeunes et de leur ouvrir les yeux sur l’importance de suivre la destinée qui leur fait envie plutôt que celle tracée pour eux : cabinet de conseil, M&A, finance…
Il m’a touchée parce que, du haut de ses 23 ans, il a décidé de ne pas se fuir lui-même.
Il me semble que, pour la majeure partie des adultes d’aujourd’hui, dans les sociétés dites développées, la fuite soit une expérience quotidienne.
Ces adultes dont je parle ne fuient pas leurs responsabilités, ils se fuient eux-mêmes.
Je me mets aussi dans le même bain, d’où le partage de cette analyse.
On fuit les appels à l’aide de notre corps lorsque le stress crée des trous béants dans notre énergie. On fuit les cris de désespoir le matin quand on doit faire face à des choix de vie, un travail qui remplit le compte en banque pour payer les factures et pas le cœur. On fuit la douleur d’envoyer ses enfants très jeunes dans un endroit où ils seront assis toute la journée comme de bons petits soldats.
Pourquoi fuit-on ?
Je me suis posé la question parce que, sincèrement, j’ai envie d’y répondre.
Pourquoi fait-on tous ces choix qui ne nous nourrissent pas ?
Pourquoi continue-t-on à diriger notre énergie à nous forcer à nourrir une vie, un travail qui ne nous fait pas vibrer de l’intérieur ?
Répondre au pourquoi ne serait qu’une partie de la réponse.
L’autre partie, pour moi plus importante, serait : qu’est-ce qu’on pourrait faire pour ne plus fuir ?
Le pourquoi :
On a été entraînés à faire passer nos émotions et nos élans après les besoins d’un système qui ne dort jamais.
On a grandi dans un système qui t’applaudit quand tu “gères”, quand tu “produis”, quand tu ignores tes tripes pour rester fonctionnel·le.
Le comment, je te propose 8 micro-révolutions:
1. Le rendez-vous quotidien avec soi-même (3 à 5 minutes suffisent)
Pas un “moment bien-être”. Un vrai moment de rencontre. Tu t’assieds. Tu respires. Tu te demandes honnêtement :
Qu’est-ce que j’évite en ce moment ?
Qu’est-ce que je ressens dans mon corps ?
Qu’est-ce que j’aimerais faire là, maintenant, si personne ne me regardait ?
Tu ne dois rien faire de productif avec les réponses. Tu dois juste… écouter.
2. Stopper la machine pendant la journée (technique du micro-arrêt)
Choisis un moment aléatoire dans la journée (un mail envoyé, un message vocal reçu, un passage aux toilettes…), et impose-toi une pause de 30 secondes où tu ne fais rien.
Juste ressentir : suis-je en fuite ou en présence ?
3. Prendre une décision par jour basée sur une envie et non sur une obligation
Une petite. Vraiment petite. Du style :
Boire un thé au lieu d’un café parce que t’en as marre d’exciter ton système.
Dire “non” à une invitation qui t’épuise.
Prendre 20 minutes sans téléphone.
T’autoriser à ne rien résoudre.
4. Se mettre en lien. En vrai.
Parler à quelqu’un qui ne veut pas te “corriger”.
Un espace où tu peux dire “je me sens vide” sans qu’on te réponde avec une astuce de productivité ou une citation Instagram.
5. Remettre en question la performance, même dans la spiritualité, la guérison ou le développement perso.
Tu n’es pas censé·e “guérir bien”. Tu n’as rien à prouver à qui que ce soit en méditant, journalant, respirant ou devenant un Bouddha moderne.
Tu peux juste… être. Et c’est déjà une “désobéissance” magnifique à ce système tellement contrôlant et exigeant qui nous gouverne.
6. Revenir à ce qui nourrit – et créer à partir de là.
Quand tu arrêtes de courir pour répondre à une société de production, une chose magique (et souvent un peu flippante) se produit :
Tu te retrouves face à une question essentielle :
👉 Qu’est-ce qui me nourrit vraiment ?
Pas juste “ce que j’aime bien faire”.
Mais ce qui te ressource. Ce qui t’apaise, t’élève, t’enracine.
Tu peux commencer par ça :
Quelles activités me laissent plus vivant·e après qu’avant ?
Qu’est-ce que je fais même quand personne ne regarde ?
Qu’est-ce qui m’obsède, me touche, m’appelle ?
Si je ne devais rien prouver, que créerais-je ?
Ce genre d’introspection, c’est pas un luxe de privilégié·e.
C’est une forme de survie consciente. Une manière de te replacer au centre de ta propre vie.
Et de là… naissent des projets vrais.
Pas des “projets à succès”.
Des projets porteurs de sens.
Des projets construits à ton rythme, qui te nourrissent autant qu’ils nourrissent le monde.
7. Et puis il y a l’argent. Et les factures. Et cette voix : “Suivre tes rêves, c’est mignon, mais ça ne paie pas le loyer.”
On ne va pas faire semblant ici.
Le capitalisme ne te laisse pas juste “explorer ta lumière intérieure”.
Il t’oblige à monétiser ton temps, ton énergie, ta créativité — ou à culpabiliser de ne pas le faire.
Et pendant que tu te demandes “ce que tu veux vraiment faire dans la vie”, une autre voix te dit : 👉 “Commence déjà par payer ton loyer, merci.”
Alors tu t’adaptes.
Tu coupes dans tes rêves. Tu “priorises”. Tu sécurises.
Mais à l’intérieur ?
C’est le deuil.
D’un chemin qui t’appartenait. D’un feu que tu n’as pas laissé vivre.
Et parfois aussi… d’une santé mentale abîmée à force de faire semblant.
Et si on arrêtait de croire qu’il faut choisir ?
Et si on construisait nos vies en partant de deux vérités :
Oui, payer ses factures est une réalité matérielle incontournable.
Oui, ignorer son âme finit par coûter encore plus cher.
La clé n’est pas dans le sacrifice permanent, ni dans le fantasme de “vivre de sa passion” en 3 mois.
La clé, c’est dans une construction patiente, consciente et engagée :
Créer un revenu qui ne t’arrache pas l’âme.
Diminuer tes charges quand c’est possible.
Laisser 10, 20 ou 30 % de ton temps à des projets qui ont du sens — et les laisser grandir.
Et surtout, ne pas confondre tes rêves avec des caprices.
Tes rêves sont des directions, pas des distractions.
8. “Mais…”
Ce mot qui paraît petit, mais qui te retient en laisse.
Tu connais ce discours-là, non ?
“J’aimerais faire autre chose, mais j’ai un crédit.”
“Je voudrais ralentir, mais c’est pas possible en ce moment.”
“Je rêve de créer ça, mais qui suis-je pour le faire ?”
“Je sens que ce job me tue à petit feu, mais il est bien payé.”
Le “mais” est devenu une formule magique.
Il donne une excuse élégante à la stagnation.
Il crée une illusion de lucidité, alors qu’en vrai… il t’empêche de bouger.
Le “mais” est rarement un obstacle réel.
C’est souvent une peur habillée en logique.
Et le pire ? C’est qu’on s’y accroche comme à une sécurité.
Parce qu’abandonner le “mais”, c’est accepter qu’on a le pouvoir de changer.
Et ce pouvoir-là fait peur.
Et si tu remplaçais “mais” par “et” ?
“J’ai un crédit, et je peux envisager un rythme plus doux.”
“C’est pas possible aujourd’hui, et je peux poser une intention pour dans 3 mois.”
“J’ai peur, et j’ai envie d’y aller quand même.”
Tu n’as pas à choisir entre ton “oui” et tes peurs.
Tu as juste à ne pas t’arrêter au “mais”.
✨ Tu veux désobéir avec moi ?
Revenir à toi, ce n’est pas une régression. C’est une renaissance.
Là où l’humain revient. Là où le cœur tape plus fort que la machine.
Je te souhaite une très belle semaine, je sais que je la vivrai avec la prière dans mon coeur, que tous les humains sur terre soient libérés de la fuite.
Affectueusement,
Kenza

